mercredi 13 septembre 2017

Evolution de la salle de classe au XXème siècle


Quelques évolutions du mobilier
dans la salle de classe
Entre 1882  et 1950

(Première partie)
Panneau Rossignol, www.collectionsrossignol.com (collection musée)


La relation maître-élève

La relation entre « enseignant » et « apprenant » est en constante évolution et dépendra, tout au long du XXème siècle, autant des avancées pédagogiques que des réformes qui en résulteront. Avant 1900 et jusque dans les années 20, le maître a autorité sur les élèves, il détient ce savoir d’où il tire tout son pouvoir. Il utilise la discipline afin d'écarter toute distraction de l’écolier. Situé sur une estrade, il est face à la classe et surplombe le groupe afin de le surveiller : c’est le rationalisme, la représentation de l’Etat face aux citoyens. Toute relation affective avec les élèves est inexistante, bien qu’un certain paternalisme règne. L'élève fait partie d'un groupe classe mais ne travaille que pour lui-même. Aucun échange entre les élèves n'est autorisé, pas de communication et encore moins de débats sinon gare... Tout est centralisé par l'enseignant, seul face à tous. Il n'y a aucune dimension sociale dans les apprentissages.
Les changements seront lents pour passer de « l’instruction publique » de Jules Ferry à « l’enfant au centre du système éducatif » de Lionel Jospin et l’évolution du mobilier scolaire sera intimement liée à l’évolution de la pédagogie.


Bureau du maître vers 1890 (Musée de la Maison d’Ecole)

Le bureau du maître

Jusqu'au XIXème siècle, le bureau du maître est appelé CHAIRE et s'inspire des collèges religieux dans lesquels les lectures pieuses se faisaient à partir d'un meuble étroit et haut, accessible par plusieurs marches. L'assemblée des écoliers ou des étudiants est alors dominée du regard et de la voix par l'enseignant qui jouit ainsi d'une autorité sans conteste, se faisant obéir d'un même mouvement par tous les élèves. Dans certaines chaires, on a vu un trou aménagé afin d'y glisser une longue baguette de coudrier (surnommée « Joséphine » dans le Bassin minier) destinée soit à montrer les tableaux de lecture, soit à rappeler à l'attention l'écolier distrait.

Bien que les Instructions spéciales de 1887 ne prévoient qu'une table à tiroirs posée sur une estrade, au début du XXème siècle, le bureau est un meuble recouvert d'une austère peinture noire, moins haut, à pupitre incliné et constitué d'une niche flanquée  de deux placards. Seuls les encriers du maître, parfois en verre plus ou moins mouluré, destinés à l’encre noire ou violette et à la traditionnelle encre rouge des corrections, y apportent une note de fantaisie. Parfois, dans les écoles de filles, un petit vase en terre cuite ou en verre attend quelques fleurs des champs. Si le maître est alors plus proche de ses élèves, il guide cependant toujours un travail totalement collectif et l'emplacement de son bureau commande la disposition des pupitres.

Disposition « magistrale » de la classe (Croquis Cent Ans d’Ecole-collection musée)

Dès les années 20, de nouvelles méthodes pédagogiques apparaissent et augurent de nouvelles relations entre le maître et ses élèves. L'enseignant devient moins distant et le périmètre protégé de la chaire disparaît peu à peu.

Bureau du maître vers 1950 (musée de la Maison d’Ecole)

Après la seconde guerre mondiale, dans certaines classes, le maître supprimant l'estrade, se trouvera au niveau ou au milieu de ses élèves. La table du maître sera un bureau plat, verni ou peint, à piétement métallique parfois et, grande nouveauté, non pas disposé sur le front de la classe mais souvent dans un angle, dégageant ainsi les tableaux. Devenus verts pour une meilleure lisibilité, ceux-ci seront soulignés par une estrade permettant aux enfants d'écrire.

Certains maîtres bouleversent également la sacro-sainte disposition des tables en trois ou quatre rangées inamovibles, amorçant un travail par petits groupes, ou même un travail entièrement individualisé dans des salles remodelées dans l'espace et où l'enfant peut se déplacer (presque) à sa guise. Tout ceci est une évolution importante du statut du maître devant ses élèves. 

Disposition en « ateliers » (Croquis Cent Ans d’Ecole-collection musée)

L’éclairage des salles de classes

Un règlement pour la construction et l'ameublement des maisons d'école a été édité en 1880 et stipulait :
"La classe sera de forme rectangulaire. L'éclairage unilatéral sera adopté toutes les fois que les conditions suivantes pourront être réunies :
- possibilité de disposer d'un jour suffisant.
- proportion convenable entre la hauteur des fenêtres et la largeur de la classe.
- le jour viendra nécessairement de la gauche. (..) Que la classe soit éclairée d'un côté ou de plusieurs côtés, par une baie unique ou par plusieurs fenêtres, les dimensions de ces ouvertures devront être calculées de façon que la lumière éclaire toutes les tables". 


En effet, la lumière devait venir de la gauche... pour éclairer les mains droites qui écrivaient, les gauchers n’existaient pas ! Tout le monde devait écrire de la main droite, on alla même jusqu’à attacher les mains gauches derrière le dos, créant du même coup des « gauchers contrariés ».
Ce règlement précisait qu’évidemment, l'appui des fenêtres serait élevé de 1,20 m au-dessus du sol... rien ne devant détourner l'attention des écoliers !

L’éclairage au gaz de la classe 1882 (musée de la Maison d’Ecole)

Lampe à pétrole (collection musée)

Vers 1900, les salles du musée sont équipées de 4 lampes de plafond alimentées au gaz de ville. D'autres écoles possédaient un éclairage à pétrole (lampes traditionnelles sur pied), notamment dans les campagnes.

Eclairage plus « moderne » (musée de la Maison d’Ecole)

Avec l'usage courant de l'électricité apparurent les "globes", suspensions de verre accrochées à une tige métallique qui devaient assurer une bonne diffusion de la lumière directement au-dessus des élèves. Ces "globes" seront plus tard remplacés par des tubes à "néon" suspendus eux aussi, au-dessus des élèves. Une nouveauté sera l'apparition d'un éclairage propre pour les tableaux (à base de tubes lui aussi).

Tableau noir mural vers 1890  (musée de la Maison d’Ecole)

Le tableau noir

En 1840, le tableau noir n'est pas l'objet le plus important de la classe. Les tableaux de lecture, fixés aux murs et portant les lettres de l'alphabet et les syllabes, sont davantage en évidence.

En 1881, ce tableau noir fait partie du mobilier scolaire, il est soit sur chevalet, soit mural. Le maître calligraphie les modèles d'écriture, les maximes et les énoncés à la craie carrée. Les élèves se groupent autour pour les corrigés d'exercices.

Tableau noir sur chevalet vers 1890 (musée de la Maison d’Ecole)

Les Instructions de 1936 exigent des tableaux noirs, visibles par tous les enfants. Le tableau sur chevalet étant encombrant, souvent oblique donc peu efficace, sera remplacé en 1950 par des tableaux muraux à triptyque. Les volets pivotants offrent une grande surface pour un faible encombrement...

Tableau vert après 1950 (musée de la Maison d’Ecole)

Le tableau virera peu à peu du noir au vert foncé ! La craie carrée traditionnelle, quant à elle, sera remplacée par un agglomérat de plâtre.

Le maître prépare alors sa classe sur ces tableaux : lecture, opérations, problèmes, exercices de grammaire ou de conjugaison, cartes de géographie, croquis de sciences... L'élève n'aura pas de suite l'usage de ces tableaux si ce n'est pour qu'un "volontaire" écrive la dictée hebdomadaire, caché derrière un panneau, pendant que les autres l'écrivent sur leur cahier, ceci permettant une correction plus rapide.

Il faudra attendre les années 1970 pour que le tableau devienne un outil pédagogique à la disposition des enfants et apparaîtront dans les années 80 les tableaux recouverts de « Véléda » blanc avec leurs feutres effaçables mais dont la pointe est souvent sèche si on oublie de les reboucher…


Catalogue de mobilier et matériel scolaire "Les fils d'Emile Deyrolle", 1925 (collection privée)

Catalogue de mobilier et matériel scolaire "Les fils d'Emile Deyrolle", 1925 (collection privée)



A suivre…
P.P









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